Thursday, May 28, 2015
Friday, May 08, 2015
QUELQUES POINTS SUR LES "i"
Je me manifeste rarement sur mon blog
car l’essentiel est dans mes romans. Et puis j’ai la sensation ici de lancer un
message qui va vite être englouti dans une mer numérique. Je suis aussi
conscient que le texte ci-dessous sera moins consulté qu’une vidéo débile sur
YouTube ou qu’un selfie sur Twitter. Mais si ce n’était pas le cas, ce que je
vous dis ici n’aurait plus aucun sens.
J’ai choisi d’intervenir sur ce
blog aujourd’hui à l’occasion de la sortie de La Porte du Messie chez
Pocket, soit un an après la publication du roman au Cherche Midi. Histoire de
mettre quelques points sur les « i ». Les médias ont peu parlé de La
Porte du Messie malgré l’éclairage inédit voire révolutionnaire qu’il
apportait sur notre pauvre humanité. Mais parallèlement à cette omerta
médiatique, un bouche-à-oreille très favorable a permis au livre de circuler
entre les mains, nombreuses, de ceux qui voulaient savoir. Depuis Le Dernier
testament qui date déjà de dix ans, je m’efforce en effet de démonter
le monde dans lequel nous vivons pour en révéler le fonctionnement sous la
forme de romans. Pourquoi des romans ? Parce que depuis Aristote, l’art
joue le rôle de catharsis. Il est la meilleure arme pour corriger notre regard
altéré par les habitudes et les conventions. Et Dieu sait combien nous avons
besoin d’y voir plus clair ! Car aujourd’hui, nous vivons dans un monde de
fiction que nous prenons pour la réalité, administré par des gens que nous ne
connaissons pas et par une technologie tentaculaire de plus en plus intrusive
et sophistiquée qui a remplacé les facultés humaines et surpassé les
interactions sociales. Pour faire simple tout en rendant hommage au
chef-d’œuvre des Wachowski, on appellera « la matrice » ce monde qui
nous a asservis. Les signes qui attestent que nous en sommes les serfs sont
pléthores. Nous sommes revenus au temps de la caverne selon Platon, enchaînés,
esclaves, avec des œillères, dos à la réalité. Pire, nous sommes devenus, comme le craignait Einstein, une génération
de cons.
En voici au moins 27 preuves.
1. Nous sommes tous dépendants
d’un appareil qu’on appelle ironiquement un smartphone. Il envoie en permanence
des données à la matrice. Il mémorise nos souvenirs, programme notre vie, nous
oriente, répond à toutes nos questions. Il est l’interface entre le monde réel
et nous. Il nous empêche de voir la vérité en face. Levez les yeux de votre
propre écran et regardez les gens autour de vous, dans la rue, dans les
transports en commun, au restaurant, au cinéma, dans les jardins publics ou à
la plage. Ils sont tous connectés à la matrice. Ils ne voient pas la réalité
autour d’eux, mais celle qui est renvoyée sur leurs écrans. Ils retournent
parfois leur appareil sur le monde mais principalement pour se prendre en
photo.
2. Nous travaillons pour des maîtres
cyniques que nous ne voyons jamais : multinationales, fisc, banques et
organismes d’Etat qui redistribuent nos revenus à des gens que nous détestons.
3. Nous travaillons durement pour
nous payer des objets dont nous n’avons pas besoin, que nous n’avons pas les
moyens d’acheter et qui nous rendent esclaves des organismes de crédit.
4. Nos vacances saisonnières
ressemblent aux transhumances. La différence est que le bétail, lui, ne paye
pas pour ça.
5. Nous votons pour différents
partis politiques qui appliquent le même programme lorsqu’ils arrivent au
pouvoir. Nous croyons ainsi cautionner une démocratie alors que ce
multipartisme de façade sert au contraire à diviser les électeurs pour
permettre à la matrice de régner et d’empêcher le peuple de s’unir contre
elle.
6. Nous prenons pour la réalité
ce que nous voyons à la télévision alors que tout y est scénarisé, joué, filmé,
codifié pour déclencher des stimuli chez les téléspectateurs.
7. Nous nous croyons libres alors
que nous nous plions à une multitude de règles, de lois, de normes, de codes,
d’obligations et d’interdictions dès que nous mettons un pied dehors.
8. Nous nous croyons fraternels
tout en restant indifférent au sort de nos frères de sang, de religion ou de
race.
9. Nous nous croyons égaux dans
une société hyper hiérarchisée par la préséance, les privilèges et l’argent.
10. Nous refusons de nous
défendre nous-même depuis que nous avons confié cette tache à des inconnus peu
concernés et souvent peu compétents, mandatés par les autorités.
11. Nous continuons à croire les
médias d’informations qui ont été créés pour façonner l’opinion publique.
12. Le sport à la télévision nous
préoccupe plus que la dégradation alarmante de notre environnement.
13. Nous qualifions de
« partis écologistes » des partis qui ne défendent pas
l’environnement.
14. Nous nous indignons et nous
défilons lorsque tout le monde s’indigne et défile. Nous ne bronchons pas quand
personne ne bronche.
15. Nous nous réjouissons quand
on nous dit de nous réjouir.
16. Nous nous divertissons comme
des enfants.
17. Nous consommons jusqu’à la
dépendance les drogues des laboratoires pharmaceutiques en croyant que nous
vivrons mieux physiquement et mentalement.
18. Nous ne nous intéressons
qu’aux gens qui sont déjà célèbres. Pour faire connaître quelqu’un qui n’est
pas encore connu, la matrice dit qu’il est célèbre. Ce qui est inconnu ne nous
intéresse pas et peut même faire peur.
19. Le jour où dans la liste des
best-sellers, on verra apparaître une œuvre non conventionnelle et non
approuvée par la matrice, cela signifiera que les rangs de la résistance auront
grossi et qu’il reste un espoir. Pas avant.
20. Nous nous ruons vers les
salles de cinéma qui ne proposent plus que des films de super héros, des
dessins animés, des films d’époque ou des comédies. On ne doit pas montrer le
monde réel. La France s’est même spécialisée dans les comédies bien-pensantes.
Les acteurs, les scénaristes et les réalisateurs y sont de plus en plus
remplacés par des gens issus de la télévision et donc de la matrice.
« Riez gentiment pour ne plus penser à votre vie de merde » est la
devise d’un cinéma qui n’a plus rien à voir avec un art.
21. Ce qui atterrit dans nos
assiettes n’est pas ce que nous croyons. Quand il y a un emballage,
nous pouvons lire la liste des ingrédients que nous mettons dans notre corps
même si pour certains de ces composants nous ignorons à quoi ils font
référence. Mais en ce qui concerne les fruits et légumes gorgés de pesticides,
les mollusques au cadmium, les poissons plein de plomb et les viandes saturées
d’antibiotiques, rien n’indique ce que vous avalez exactement.
22. Nous croyons que les people
dans les magazines sont de vraies personnes.
23. Nous idolâtrons des sportifs
qui ont le Q.I. d’une huître et nous vénérons des idiots parce qu’il passent à
la télé.
24. Nous nous habillons, nous
fardons et nous parons avec des produits testés sur des animaux ou fabriqués
par des esclaves plus jeunes et plus maltraités que nous à l’autre bout du monde.
25. Qui autour de vous a déjà
défendu une vision des choses inédite ?
26. Nous ne remettons rien en
question, ni les acquis, ni l’histoire, ni les croyances. Remettre en cause une conception du monde, une
croyance religieuse ou une certitude scientifique inculquée depuis l’enfance
est biologiquement impossible. Une telle décision supposerait d’interrompre des
milliards de connexions synaptiques dans notre cerveau pour en créer des
milliards de nouvelles. Cela représenterait une trop grande dépense énergétique
qui irait à l’encontre de notre instinct de survie.
27. Nous ne verrons pas ce genre d’article dans les
colonnes d’un journal. Car les journaux préfèrent détourner notre attention de
la vérité avec un fait divers digne d’un polar à la con, nous endormir avec des
promesses de politiciens, nous abêtir avec des nouvelles sportives ou encore
nous inhiber avec les malheurs du monde face auxquels nous demeurons
impuissants.
J’arrête ici la liste mais je
pourrais continuer. Dans ce contexte, on comprendra aisément pourquoi les
médias n’ont pas souhaité parler de La Porte du Messie qui remettait en
question les milliards de connexions synaptiques dans les cerveaux
de milliards de personnes. Je continue néanmoins mon travail de sape contre la
matrice. Dans mon prochain roman dont je viens de remettre le manuscrit à mon
éditeur, j’éradique plus largement et plus radicalement nos croyances. Car
elles touchent cette fois à toutes les religions et civilisations. La moitié de
la population mondiale sera directement concernée. Il me tarde de glisser le
livre discrètement entre les mains de ceux qui veulent encore résister à la
matrice.