Wednesday, November 23, 2016
Au début tu as très peur.
Les producteurs qui jugeaient ton
scénario génial le reformatent soudain à la tronçonneuse. Quinze versions plus
tard, tu recolles encore les morceaux et tu essayes de raccorder les scènes qui
ont résisté à l’équarrissage. A quelques jours du premier clap tu t’efforces
avec le réalisateur de redonner de la cohérence et du sens à l’ensemble.
Tu as de plus en plus peur.
Et puis tu débarques en voyeur
sur le tournage. Là, tu fais connaissance avec le casting. Tu es d’abord
scotché par l’actrice qui a été choisie pour incarner ton héroïne. Elle est
mille fois plus canon que sur les photos. Elle est la sublime chair et la voix
du personnage que tu as couché sur le papier. Tu déjeunes ensuite avec les
acteurs qui endossent les autres rôles. Dans la vraie vie, ils ont la cool
attitude comme dans ton script, comme si c’était eux qui t’avaient inspiré ces
individus peu ordinaires ! Enfin tu rencontres la star, l’acteur que tu
adorais il y a vingt ans au cinéma et que tu retrouves aujourd’hui dans la peau
d’un héros sorti de ton imagination. Tu redeviens un gosse et c’est lui qui te
dit merci de lui avoir écrit un tel rôle. Car tous ces comédiens qui donnent
une âme à tes personnages sont animé de cette humilité distinguant l’artiste
du faussaire. Sur le plateau qui ressemble à une ruche, une cinquantaine de
personnes bourdonnent, chacun à sa tâche pour mener à terme cette entreprise
démiurgique qu’est la création d’un film ou d’une série : producteurs
angoissés, accessoiristes agités, assistants surmenés, script concentrée, chef
opérateur pointilleux, cascadeurs remontés à bloc, chorégraphes allumés,
décorateurs magiciens, maquilleuses et coiffeuses aux petits soins, costumières
aux mains de fées, techniciens perfectionnistes. Au milieu de ce chaos tiré au
cordeau, tu vois le réalisateur, génial thaumaturge régnant sur son armée de
stakhanovistes. Il est en train de transformer tes mots en scènes saisissantes,
ta didascalie en plans spectaculaires, tes dialogues en émotions. Tu le vois
changer ton histoire en œuvre d’art. Puis tu visionnes les premières images.
Bouche bée. Tu réalises alors que tu as de la chance.
Et là tu n’as plus peur du
tout.
1 Comments:
Cher Philip,
Oui je confirme, au début tu as peur.
Apparemment, l’aventure de The Way est prometteuse…
Un tournage c’est intense et unique : profite bien de ces moments de magie.
Hâte de découvrir les images…
Bisous,
Nathalie.
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