Saturday, May 29, 2010

ALLÔ HOUSTON, ICI LA TERRE

BP est en train de détruire un morceau de la Terre. Comme la Russie l’a fait en Ukraine en 1986. Cela se passe cette fois dans le golfe du Mexique. Déflagration tellurique collatérale, violente hémorragie d’une planète bleue devenue Etoile Noire, colonnes sauvages d’hydrocarbures vomies des abysses, tornades de carburant brut et pâteux transformées en épais linceul visqueux, ombre gluante surgie du pire des films catastrophes pour apporter la mort, magma minéral engloutissant un pan de civilisation, le Sud, les Bayous, le Mississipi, les rivages de la Louisiane. Les dizaines de millions de litres d’une précieuse énergie fossile patiemment fabriquée par la nature pendant des millénaires, sont devenues en moins d’un mois une marée mortelle à faire passer un tsunami pour une brise marine.
BP a déversé sur la mer des millions de litres de dispersants toxiques afin de masquer le pétrole en surface, refoulant à trois mètres de profondeur le mur noir et liquide qui anéantit tout sur son passage, poissons, faune, flore. BP déploie une technologie à deux balles en la faisant passer pour du matériel de pointe censé colmater la brèche. Tout le génie de la communication de la firme est là. Pas d’oiseaux mazoutés, ni de marais englués, ni de marée noire à montrer. Opération Top Kill, Over Kill, From a view to a kill ou Kill Kill Bang Bang, peu importe il faut que ça sonne bien. Don't worry, on s’occupe de tout les gars !
BP serait capable de fissurer le noyau terrestre sans nous alarmer et même d’embaucher Bruce Willis pour diriger le colmatage en direct.
D’autres catastrophes suivront. Les leviers qui les déclenchent ne manquent pas et la plupart sont tenus par une main humaine. Suivant l’axiome d’Einstein, selon lequel la bêtise humaine est infinie, ils seront actionnés tôt ou tard.
En attendant, nous assistons au désastre, témoins impuissants, consommateurs complices et parfois responsables via un petit placement bancaire ou un fond de pension indexé sur le résultat financier du groupe pétrochimique. Maintenir coûte que coûte, même les pieds dans le mazout, nos éconocroques, nos revenus, notre niveau de vie, notre croissance, notre marché.
Nous ne verrons plus jamais la Louisiane comme elle était. On l'oubliera peu à peu. L’automobiliste qui râle mollement devant son journal de 20 heures zappera sur un match de foot et le président des USA qui se noie dans de beaux discours en se lamentant trouvera d’autres chats à fouetter. Kim Jong-il s’agite déjà pour faire diversion.
Faut-il être défaitiste ? Certains comparent cette catastrophe à celle du 11 septembre 2001. Pour parfaire la comparaison, il faudrait détourner un avion plein du kérosène arraché aux tripes de la Terre par BP pour le fracasser contre le siège de la multinationale à Houston. Allô Houston ? Ici la Terre que tu salis et que tu saignes.

1 Comments:

Blogger Unknown said...

bien dit
pas mieux

1:04 AM  

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